Auteur : Flavienne Sapaly

Etre acteur du changement : les 8 lois du changement (travaux de Stephan SCHWARTZ)

Dans un monde où l’urgence du changement se fait de plus en plus pressante, Stephan Schwartz[1] propose une voie singulière, fondée non sur la force ou la confrontation, mais sur la non-violence, la compassion et l’« être-té » — ce noyau intime de cohérence entre ce que nous sommes, pensons et faisons. Assister au discours de Martin Luther King, « I Have a Dream », fut pour Schwartz un tournant fondateur. Il y découvre une question centrale : quels sont les mécanismes par lesquels une poignée de personnes peut, sans violence, faire advenir des changements sociaux profonds et durables ? Son travail de chercheur et d’historien l’a conduit à identifier 8 lois du changement[2], toutes issues de l’analyse rigoureuse de mouvements réussis dans l’histoire humaine : de Gandhi à la chute du mur de Berlin. Ces lois ne sont pas des recettes miracles, mais des règles de cohérence intérieure et collective, qui permettent à chacun, à son échelle, de devenir acteur de la transformation individuelle et mondiale. Les 8 lois du changement selon Stephan Schwartz Partager une intention commune : qu’elle soit personnelle ou collective, l’intention donne la direction au changement. Ne pas avoir de préférence en matière de résultats : on agit sans s’attacher à l’issue, dans une forme de lâcher-prise actif. Accepter que les objectifs puissent ne pas être atteints de son vivant : le changement dépasse l’individu et s’inscrit dans une temporalité plus vaste. Renoncer à la gloire personnelle : l’action juste se suffit à elle-même, sans attendre reconnaissance ni statut. Considérer chaque personne sur un pied d’égalité : quelles que soient sa culture, sa fonction ou son origine, chacun a la même dignité. Renoncer à toute violence, en pensée, en parole ou en acte : c’est la condition pour que le changement soit durable. Aligner vie personnelle et posture publique : la cohérence entre ce que l’on prône et ce que l’on incarne est indispensable. Agir toujours avec intégrité et bienveillance : sans cela, le changement génère sa propre ombre. L’« être-té » comme socle d’action Au cœur de ces principes se trouve une notion subtile mais essentielle : l’« être-té », que Schwartz reprend de Gandhi. Ce terme désigne la nature de votre caractère : ce que vous êtes, votre manière d’être, la cohérence intime entre vos actes, vos choix, votre regard sur les autres et vous-même. C’est ce noyau invisible mais perceptible qui rend votre action crédible, contagieuse, inspirante. L’« être-té » n’est ni performance, ni posture morale. C’est un art de la présence, un engagement silencieux mais profond. Et c’est aussi cela qui, selon Schwartz, favorise un changement réellement transformateur. Le rôle de chacun dans l’unité du vivant La vision de Schwartz repose sur une autre intuition forte, désormais appuyée par les sciences contemporaines : nous sommes interconnectés. Nos choix individuels, jusqu’aux plus anodins, contribuent à façonner un champ collectif. Agir à partir de son être, c’est aussi influencer un système beaucoup plus vaste. Il ne s’agit pas seulement de stratégie sociale, mais d’une manière nouvelle de comprendre la transformation : de l’intérieur vers l’extérieur, du subtil vers le visible. Il ne suffit pas de protester : il faut incarner. Il ne suffit pas de vouloir : il faut vibrer en cohérence. Loin des injonctions héroïques ou des luttes acharnées, la voie proposée par Stephan Schwartz est exigeante mais radicalement humaine. Elle invite à changer en demeurant fidèle à soi, à créer sans imposer, à agir dans la justesse plutôt que dans la puissance. En temps de crises, cette perspective ouvre un chemin précieux : celui d’une transformation porteuse de sens, de paix, et de durabilité. [1] Stephan Schwartz est un pionnier de l’archéologie intuitive, professeur à l’université de Saybrook, responsable du groupe cerveau, esprit, soin au Samueli Institute chercheur au Cognitive Sciences Laboratory (laboratoire des sciences cognitives), membre de la fondation BIAL. Depuis 40 ans, il étudie la nature de la conscience, et plus particulièrement son aspect indépendant de l’espace et du temps. [2] « Les 8 lois du changement – Devenez acteur de la transformation individuelle et mondiale », Ed Guy TREDANIEL 2019  

Qu’est qu’un coaching réussi?

Qu’est qu’un coaching réussi ? Dans l’un des groupes de supervision que j’anime nous avons dû repenser explicitement l’intérêt du contrat de coaching tripartite. Pourquoi ? parce que le doute s’instaure lorsque l’écart se creuse entre les objectifs fixés au démarrage dans les règles de l’Art et ce qui émerge pour le coaché au cours du contrat. Coacher pour rester… ou pour partir ? Depuis quelques années, un phénomène interpelle : de plus en plus de personnes choisissent, à l’issue d’un coaching réussi, de quitter leur entreprise. Non pas par fuite. Par lucidité. Ce constat peut déranger. Et pourtant, il ne traduit ni une défaillance du coaching, ni une déloyauté du coaché, ni une erreur de casting de l’entreprise. Il est simplement le reflet d’un processus vivant, authentique, qui parfois révèle que les chemins se séparent… en bonne intelligence ou pas selon le contexte. L’alliance tripartite : point de départ indispensable, Un coaching professionnel commence toujours par-là : s’assurer que les attentes de l’entreprise et les intentions du coaché sont compatibles. C’est une base déontologique, une marque de respect pour tous. L’entreprise n’est pas un ennemi du coaching — elle en est souvent la première initiatrice ; elle n’est cependant pas toujours prête à en assumer les conséquences :  quand une partie bouge c’est tout le système qui est invité à bouger parfois. Par ailleurs, comme tout chemin de transformation, le coaching peut faire émerger des vérités inattendues. Un coaché peut découvrir que ce qui l’animait hier ne suffit plus. Ou que les évolutions de l’organisation sont devenues dissonantes avec sa boussole intérieure. Ce n’est pas une rupture de contrat : c’est une évolution de conscience. Le paradoxe du coaching aux objectifs rationnels Il y a là une tension à accueillir : beaucoup d’entreprises souhaitent des objectifs clairs, mesurables, pilotables. Cela se comprend : le coaching représente un investissement, et toute organisation a besoin de repères. Mais le paradoxe, c’est que plus un coaching est profond et respectueux du vivant, moins ses effets sont prévisibles. Un coaché peut gagner en confiance, affirmer sa posture… et vouloir rester. Mais il peut aussi, à force de se réconcilier avec lui-même, prendre conscience que son rôle actuel ne fait plus sens. Le coaching l’a aidé à se remettre au centre de son existence.Et parfois, ce centre n’est plus dans l’entreprise. Changer de poste, ou changer de cap ? Faut-il s’en inquiéter ? Pas nécessairement. Un coaching qui amène un collaborateur à prendre une décision libre, posée, en lien avec ce qu’il est devenu, est un coaching réussi. Même si cela signifie une mobilité interne. Ou un départ. Ce qui compte, c’est la qualité du discernement, pas le maintien en poste à tout prix. Critères d’un « bon » coaching (même s’ils ne rentrent pas dans un tableau Excel) Ce qui m’invite à déterminer que le processus de coaching a porté ses fruits, au-delà des indicateurs classiques (atteinte des objectifs….), peut se nommer ainsi : Le coaché retrouve un pouvoir d’agir personnel, non dicté par ses peurs ou par la volonté de plaire. Il gagne en lucidité sur son environnement et sur ses propres fonctionnements. Il affine sa boussole intérieure : ce à quoi il veut contribuer, ce qu’il est prêt à traverser, et ce qu’il ne veut plus nourrir. Il fait des choix cohérents, assumés, alignés avec ce qu’il est devenu — non par opposition, mais par fidélité à lui-même. Et surtout : il devient un acteur libre de ses décisions, et non le produit d’une injonction extérieure. La responsabilité du coach Le coach n’est pas responsable de ce qui se passe à l’issue du coaching. Il n’a aucun pouvoir sur les choix d’une personne. En revanche en cours de contrat, que doit-il faire si le client manifeste son désir de quitter l’entreprise ? Est -ce que cela justifie de mettre fin au contrat d’accompagnement ? d’informer le manager ou le DRH ? Notre principale obligation est d’être garant du processus et de veiller à ce que le coaché ait fait, tant que faire ce peu, tout ce qui est de son ressort pour dialoguer avec l’organisation sur ses attentes et ses besoins s’ils ont évolué. Une tripartite intermédiaire peut contribuer à faciliter ce dialogue s’il s’avère délicat. La décision de partir, pour autant ne peut pas toujours être dévoilée et cela génère de profonds conflits éthiques car la relation de confiance coach/coaché suppose une position partagée. C’est l’espace de supervision qui permet de discerner l’attitude qui permettra d’être loyal au contrat et au coaché. Mais c’est aussi en amont du coaching que cette perspective peut être abordée. Un espace de maturité collective Loin d’être une menace, ces évolutions sont une opportunité pour les entreprises : celle de s’entourer de collaborateurs alignés, engagés par choix, et non par inertie ou obligation. À une époque où l’engagement ne se décrète plus, où la quête de sens devient centrale, le coaching offre un espace de dialogue authentique entre l’individu et l’organisation. Encore faut-il accepter que la vérité ne soit pas toujours confortable. Mais elle est toujours féconde, si l’on s’y rend avec ouverture.

Changer le monde : entre révolution des paradigmes et résistances : le syndrome de Bernard Lhermite

Nous vivons un moment de basculement. Tout le monde en parle. Un entre-deux inconfortable. Pourquoi est-ce si long et compliqué ? Une tension palpable par beaucoup de mes clients. Un accouchement difficile aux contractions douloureuses. Et comme souvent face à l’inconfort, surgit une tentation de repli vers des certitudes anciennes, des identités figées, ou de colère exprimée parfois de façon violente ou à travers des votes politiques chaotiques. Quels sont ces paradigmes « menacés » qui résistent? Un paradigme est un ensemble de croyances qui structurent la façon dont une société comprend le monde et fonctionne. Dans notre culture occidentale, les paradigmes anciens sont à la fois remis en question et à l’origine de résistances. Je pense au patriarcat, qui continue d’imprégner nos rapports sociaux et familiaux ; au matérialisme, qui fait de la possession un horizon de sens ; la performance, qui prone l’efficacité au dépens du bien être des sujets au travail ; à notre relation à la nature, longtemps dominée par le fantasme de contrôle ; et au rationalisme, qui rejette toute connaissance non objectivable. Changer ces fondations n’est pas un long fleuve tranquille. On n’a jamais autant vu de mouvements contraires coexister. Probable signe d’une étape de résistance. « Nous ne sommes pas à la fin du monde, mais à la fin d’un monde. Et plusieurs mondes coexistent déjà. » Prenons l’exemple des mouvements pour l’égalité de genre : chaque avancée se heurte à du cynisme. Ne parlons pas du mouvement LGBT. C’est la même chose avec notre rapport à la nature : on parle de durabilité, mais les habitudes de surconsommation ont la vie dure. Aujourd’hui « être contre » fait le buzz! Les étapes du syndrome du « Bernard-l’Hermite » : Le syndrome du Bernard-l’Hermite, tel que décrit par François P. Mathijsen[1], illustre quatre grandes étapes par lesquelles passe un individu (ou un collectif) confronté à une expérience qui remet en cause ses habitudes et repères fondamentaux : L’effraction: un événement vient ébranler la structure de référence habituelle — une crise, un bouleversement émotionnel, une révélation intérieure. La mise en crise du paradigme: les croyances anciennes vacillent. L’individu (ou le collectif) doute, cherche, questionne. Ce qui tenait jusque-là semble inadéquat pour comprendre ce qu’il vit. La lutte: un combat intérieur s’engage entre l’ancien et le nouveau. L’identité se fragmente, des tensions se multiplient. Ce moment est souvent celui de l’isolement, de la confusion, parfois de la souffrance voir de la violence. La réorganisation: une nouvelle cohérence finit par émerger. L’individu  (le collectif) réinterprète le réel à partir d’un autre cadre. Un nouveau paradigme est intégré, mais il est encore fragile. Ce modèle met en lumière les turbulences intérieures provoquées par un changement de vision du monde. Comme le dit Renard[2], « la réduction rationaliste et l’expansion merveilleuse apparaissent comme deux processus normaux du psychisme humain ». Aujourd’hui, nous sommes en pleine rupture cognitive, un moment inconfortable, mais nécessaire pour construire de nouveaux repères. Une nouvelle compétence à développer : la reste-habilité (3) Rester dans la tension est pour moi un acte de maturité. Et c’est en soi un changement de paradigme dans un monde forgé à la logique problème/solution C’est précisément dans cette tension qu’émerge la possibilité d’un autre rapport à soi et au réel. Accepter de demeurer dans cet entre-deux, sans céder au désespoir ni à l’impatience, est un acte de maturité profonde. Cette tension n’est pas une anomalie à corriger : elle est le signe même du vivant en mutation. Quelle place pour l’accompagnement de ce mouvement ? Dans ce contexte, l’accompagnement, qu’il soit individuel ou collectif, n’a jamais eu autant de sens. Non pour offrir des solutions toutes faites, ni pour accélérer la traversée, mais pour soutenir l’émergence d’une posture plus ancrée, plus consciente, capable de faire place à l’inconnu. L’accompagnant devient alors moins un expert qu’un gardien du seuil, capable de soutenir l’inconfort, d’accueillir les doutes, et de révéler, en filigrane, les nouvelles voies qui cherchent à naître. Habiter ce chaos temporaire, c’est oser ne pas savoir. C’est écouter ce qui se défait sans chercher à le retenir. C’est faire confiance à la vie en mouvement, même quand elle ne répond plus aux grilles de lecture du passé. [1] F.P Mathijsen, Psychologue belge, spécialisé dans les expériences exceptionnelles, le paranormal, et leur impact sur la santé mentale. Un article publié dans Mental Health, Religion & Culture (2015) où F. P. Mathijsen propose un modèle baptisé le « syndrome Bernard‑l’hermite », qui explore les étapes cognitivo‑émotionnelles menant à un changement de vision du monde [2] Jean Bruno RENARD, Le merveilleux. Sociologie de l’extraordinaire (CNRS Éditions 2011) (3) : Expression empruntée à Issa Padovani, conférencière et enseignante Suisse de Communication Non violente entre autre

Vivre ce que l’on veut ou exprimer la vie que nous sommes ?

Vivre ce que l’on veut ou exprimer la vie que nous sommes ? Jérôme a demandé à son entreprise un coaching professionnel pour développer son impact dans l’exercice de sa fonction de cadre sup. Il veut dépasser ce qui l’en empêche pour mieux gravir les échelons. En tant que coach professionnelle, j’ai appris qu’« il n’y a pas de vent favorable pour celui qui ne sait pas où il va ». Alors, on a fixé des « objectifs » conformément à la déontologie de notre métier. Dans l’imaginaire collectif, une promesse fallacieuse, que le coaching renforce, influence nos orientations : L’idée qu’on peut « vivre la vie que l’on veut », façonner notre existence à l’image de nos désirs, à coups de volontarisme, d’outils et de plans stratégiques. La loi de l’attraction,[1] mal comprise, a renforcé cette représentation. A cela s’ajoute, d’autres injonctions très en vogue : « Sois authentique », « Ose être toi-même », « Exprime qui tu es vraiment ». De quoi parle-t-on ? Derrière cette quête d’authenticité, une confusion majeure s’est installée. On confond souvent l’expression de soi (le “moi”) avec l’expression du Soi (4). Or, tout ce qui est spontané n’est pas nécessairement juste. Tout ce qui est sincère n’est pas toujours aligné. Tout ce qui est vrai dans l’instant ne sert pas forcément la vérité de notre être. Et tout ce qui est “voulu” n’est pas au service de notre évolution. D’où viennent nos désirs ? De notre être profond ou des conditionnements sociétaux et inconscients ? Encore une fois, une confusion s’insinue entre « être responsable de sa vie » et  « maitriser » sa vie.  L’obsession du « je veux » n’est souvent qu’une manifestation des aspects blessés ou conditionnés de notre personnalité (appelés l’ego ou “moi”) : une tentative de contrôle sous prétexte de liberté. Mon avis, est que c’est ici que s’insinue la grande confusion : choisir sa vie n’a jamais voulu dire la contrôler. Oui, nous créons notre réalité (je choisis consciemment ou inconsciemment) – mais pas comme des démiurges imposant leur volonté au monde. Nous la créons par nos postures, nos ouvertures, nos réponses à ce qui advient. Choisir, au sens profond, ce n’est pas tordre la vie à notre image, c’est reconnaître l’invitation du réel et mieux déterminer la façon dont nous y répondons. Répondre avec justesse, se mesure aux fruits et à la joie (qui n’est pas équivalent au plaisir) qui résultent de l’action. « L’homme agit toujours selon les lois nécessaires de sa nature ; il ne suit pas un libre décret de la volonté. » – Spinoza[2] (Éthique). Loin du fantasme de toute-puissance, je crois aujourd’hui que la véritable liberté n’est pas d’obtenir ce que l’on veut, mais de s’accorder à ce qui est. La vie ne se plie pas. Elle s’invite en nous. Elle nous traverse. Et grâce à elle, nous dévoilons petit à petit des aspects de notre être. D’ailleurs, ce sont souvent les crises, qui nous permettent de découvrir qu’en nous, il y a plus grand que nous. La maturité, ce n’est pas chercher à vivre la vie que l’on veut, mais exprimer pleinement la vie que nous sommes appelés à être. Ce n’est pas une soumission, c’est une écoute. Loin d’un projet de conquête, c’est une posture d’accueil. Ce que Heidegger appelait le Gelassenheit, ce lâcher-prise radical face à l’être : « L’homme n’est pas le seigneur de l’étant. L’homme est le berger de l’Être. » [3]. En résumé, là où vouloir sa vie génère une crispation, Être la vie est une danse. La question est donc simple, mais vertigineuse : êtes-vous encore en train d’essayer de maîtriser votre vie sous couvert de liberté ? Ou commencez-vous à écouter ce qui, en vous, souhaite advenir ? Au fait, qu’est-il advenu de Jérôme ? Il a dit « Oui » à un projet émergent dans son organisation, au service de l’écologie. Un appel intérieur dit-il en souriant. [1] Loi de l’attraction : La loi de l’attraction fonctionne comme un aimant. Elle repose sur un principe simple, on attire ce sur quoi on porte notre attention en émettant une certaine émotion. C’est l’idée que l’on attire l’énergie que l’on dégage soi-même. [2] «Ethique », Spinoza, ed Gallimard Foliot essais (1994) [3] « Lettre sur l’humanisme », Martin Heidegger , ed Aubier (1992) (4) le Soi selon JUNG est l’archétype de la Conscience (le centre de l’être) et contient tous les contraires. Le rapport du Moi au Soi est décrit par Jung soit comme celui de la Terre tournant autour du Soleil, soit comme celui d’un cercle inclus dans un autre cercle de plus grand diamètre, soit encore comme le fils par rapport au Père. En tout humain, le Soi a un processus autonome. faire Un avec le Soi est le processus dit d’individuation auquel nous sommes tous invités.

Le fantasme des coDir s’étiole…

Les Comités de Direction (CoDir) et Comités Exécutifs (CoMex) sont souvent fantasmés comme les lieux ultimes du pouvoir en entreprise ; ce n’est pas nouveau. L’incertitude et la complexité de notre monde rend la gouvernance d’entreprise difficile ; ce n’est pas nouveau non plus. Ce qui me parait nouveau, c’est que l’absence de visibilité et de repères lié à la brutalité des évènements sociaux, écologiques et économiques, et l’émergence d’un numérique qui bouleverse les métiers (entre autres), ne confère plus à ces instances le sentiment de maitriser le futur et de pouvoir fonctionner comme des tours de contrôle. Une gouvernance fondée sur la robustesse ou sur le contrôle ? Olivier Hamant, dans La Troisième Voie, nous invite à repenser notre manière de structurer les organisations face aux défis du monde moderne. Il explique que les systèmes vivants les plus résilients ne sont pas ceux qui contrôlent tout, mais ceux qui savent s’adapter grâce à une certaine marge d’imprécision et d’ouverture. Dans cette logique, un CoDir ou un CoMex qui cherche à verrouiller toutes les décisions en contrôlant à outrance ses process est moins robuste qu’un collectif qui laisse place à l’incertitude et à l’expérimentation. « La robustesse ne se construit pas sur la prédiction et le contrôle, mais sur la capacité à naviguer dans l’incertain en cultivant la diversité des approches. » — Olivier Hamant Appliqué aux CoDir, cela signifie que la richesse d’une gouvernance exécutive ne repose pas sur la verticalité des décisions, mais sur la capacité des dirigeants à favoriser un cadre où l’intelligence collective peut émerger. Dans ce monde fluctuant, plusieurs mutations profondes transforment les attentes vis-à-vis des Comités de Direction et Exécutifs : Passer de la maîtrise à l’adaptabilité Les CoDir doivent se concevoir comme des organismes vivants, capables d’apprendre et d’évoluer, plutôt que comme des bastions de décisions gravées dans le marbre. Cela passe par une meilleure écoute des signaux faibles, y compris ceux venant des niveaux opérationnels. Réhabiliter la confiance et la transparence La dynamique de contrôle et de micro-management dans les CoDir empêche la prise d’initiative et le partage d’informations critiques. Or, comme le dit Will Schutz, « plus une équipe s’ouvre à la vérité, plus elle devient performante ». Intégrer la diversité et la contradiction Trop souvent, les CoDir restent homogènes dans leur manière de penser et fonctionnent en pensée unique. Or, la robustesse, selon Olivier Hamant, vient de la capacité d’un système à intégrer des perspectives variées. Un bon CoDir ne doit pas chercher le consensus mou, mais cultiver des tensions créatives qui permettent l’innovation. Privilégier l’expérimentation à la prévision Plutôt que d’imaginer que tout est planifiable, les CoDir doivent adopter une approche plus agile, plus itérative, où les décisions stratégiques sont testées, ajustées et coconstruites en fonction du terrain. L’évolution des CoDir et CoMex passe aussi par un changement de posture des dirigeants. Le leader de demain n’est plus celui qui sait tout et tranche seul, mais celui qui facilite l’émergence de l’intelligence collective. Will Schutz nous rappelle que l’efficacité d’une équipe dépend avant tout de la relation à soi de ses membres : « Les conflits dans une équipe ne sont que le reflet des conflits internes de chacun. Travailler sur soi, c’est déjà améliorer la performance collective. » Un dirigeant qui ne travaille pas sur lui-même, qui refuse d’exposer ses propres vulnérabilités, alimente une culture du masque et de la défiance au sein du CoDir. À l’inverse, un comité exécutif qui favorise un espace de confiance où chacun peut être pleinement lui-même devient un véritable levier de transformation collective. Si les CoDir et CoMex veulent rester pertinents à l’ère du monde fluctuant, ils doivent abandonner l’illusion du contrôle absolu pour adopter une posture d’exploration, de co-construction et d’humilité. « Le plus grand obstacle à la performance collective est la peur. Plus une équipe se libère de ses peurs, plus elle devient efficace. » — Will Schutz Les comités de direction ne doivent plus être des lieux de pouvoir où se jouent des stratégies personnelles, mais des espaces d’émergence où s’expérimente une nouvelle manière de décider ensemble. Cela implique un véritable travail de fond sur la confiance, la transparence et l’acceptation du non-savoir, trois piliers qui permettent aux organisations d’être non seulement performantes, mais aussi vivantes et résilientes.

La charge mentale des leaders et des entrepreneurs : défi sociétal et individuel

♣ À la façon dont Charles s’affale lourdement dans le fauteuil, je perçois tout le poids qui pèse sur ses épaules.« En quoi puis-je vous être utile ? »Il hésite un instant avant de répondre : « Je crois que j’ai un problème d’organisation. » ♥ Hélène, dirigeante d’entreprise, vient me voir sans demande précise, sans besoin apparent. Elle ne se sent pas épanouie, mais, dit-elle, elle n’a pas le choix. Si elle lâche, tout s’effondre. ♦ Gabriel, consultant indépendant, semble au contraire bouillonnant d’énergie. Il multiplie les activités : professionnelles, associatives, sportives. Tout lui plait…mais depuis que sa compagne l’a quitté, il s’interroge : « pourquoi je n’arrive pas à me poser ? » Trois vies, trois réalités bien distinctes. Et pourtant, une même constante : une charge mentale écrasante. Trop de responsabilités, pas assez de temps, une to-do-list interminable et des « il faut, je devrais… » plein la bouche. Le quotidien est envahi par des préoccupations, si nombreuses qu’il ne reste plus de place pour autre chose. Autre point commun : chacun d’eux est coupé de son intériorité. Le corps, chez eux, n’est plus qu’un outil, parfois utilisé à la décharge du trop-plein, parfois éteint. Et cette déconnexion s’accompagne souvent de sentiments qui rajoute de la charge mentale : la culpabilité de ne pas y arriver ou la colère face à cet autre (une cause extérieure) qu’ils rendent responsable de leur état. Nos modes de vie contemporains contribuent largement à ce phénomène. La charge mentale n’épargne personne : ni la mère de famille ni les grands patrons. Comme le souligne le philosophe Hartmut Rosa[1], nous sommes saturés par un excès de possibles. Le numérique et les technologies nous offrent un accès illimité à tout – informations, divertissements, données, contacts – mais nous privent de cet espace si précieux où la vie entre en résonance avec nos émotions, nos relations. Tout étant accessible, çà s’emballe dans la jolie roue du hamster. Addicts à la performance, nous courons toujours plus vite. Si ce n’est pas par choix, c’est sous la pression de ceux qui nous dirigent, eux-mêmes pressés de prouver leur efficience ou d’accélérer le changement. Dans ce contexte, développer son activité ou son entreprise devient un défi herculéen : être visible en communiquant, entretenir son réseau, répondre aux normes de qualité et produire des reporting pour justifier qu’on fait « bien » son travail…la liste est longue. Alors, que faire ? Peut-on vraiment se libérer de cette charge mentale ? La réponse n’est pas dans l’action, mais dans le retour à l’essentiel. Cela commence par un acte simple mais profond : se reconnecter à son intériorité. Prendre le temps d’écouter ce que le corps murmure, ce que le cœur désire vraiment. Apprendre à distinguer ce qui est essentiel de ce qui ne l’est pas. Se libérer de la charge mentale, ce n’est pas « tout lâcher » ou renoncer à ses responsabilités. C’est, au contraire, accepter d’assumer pleinement son rôle, mais en étant ancré, aligné, en apprenant à dire non sans culpabilité, à ralentir sans craindre d’être laissé pour compte. C’est aussi s’autoriser des espaces de silence et de recul. Ces moments où l’on se recentre, où l’on sort du flux pour mieux retrouver la clarté. Ni sombrer, ni lutter. Mais se défaire de ce qui, en nous, a créé une programmation, un imaginaire : quelque chose que l’on a préconçu, prédéfini, imaginé, voulu…abandonner nos chimères. Tout cela demande du courage et un désir : celui de contempler les schémas qui ont fondé notre relation au monde, aux autres et à nous même ET d’avoir confiance en la vie. Aujourd’hui plus que jamais, c’est moins à la performance qu’il faut s’atteler qu’à une réconciliation profonde avec notre intériorité. Parce que c’est là, et seulement là, que se trouve l’espace dont nous avons tant besoin. Et nous sommes tous concernés. [1] « Rendre le monde indisponible », Hartmut Rosa, la découverte Poche (2023)

Qu’est ce qui vous fait sentir légitime?

Qu’est-ce qui vous fait sentir légitime ou pas ? Cette question de la légitimité ou non légitimité est souvent évoquée dans les coachings et supervisions. On l’appelle parfois le complexe de l’imposteur. A l’origine de ce sentiment, une perception de soi, courante dans nos conditionnements occidentaux, qui fait dépendre de notre compétence et/ou de notre expérience, l’estimation de notre valeur intrinsèque. Une confusion entre « faire » et « être » qui nous empêche de nous exposer au regard des autres tant que nous n’avons pas tel ou tel niveau, diplôme, appartenance, ou validation par un tiers légitime, lui. Et force est de constater que nous n’avons pas tous la même exigence avec nous -même. Pour beaucoup, l’origine se situe dans l’enfance et dans les efforts qu’il a fallu faire pour obtenir l’amour et la reconnaissance nécessaires à notre survie. Ce qui ne signifie pas qu’il faut faire une « thérapie ». Le chemin d’individuation nous invite à prendre le risque de nous montrer à partir d’un regard confiant, positif et réaliste sur soi, quelques soit l’ « accréditation » extérieure. Et fondamentalement, cette question est pour nous tous, la révélation de nos identifications, de notre dépendance à notre image extérieure et de notre manque à Être tout simplement. « Personne ne peut vous faire sentir inférieur sans votre consentement. » – Eleanor Roosevelt Le rôle éventuel d’un coach professionnel peut être multiple. Ce rôle va différer selon les besoins identifiés de la personne et son niveau de conscience. Tantôt une posture parentale sera temporairement nécessaire pour poser un cadre qui autorise la personne à oser faire des expériences par petites touches, valider et soutenir les étapes qu’elle aura franchies, et donner notre propre sentiment sur sa valeur éprouvée … Préalablement il convient de vérifier que le projet que la personne souhaite mettre en place vient d’un élan du cœur et pas d’un « il faut, je dois pour être quelqu’un de bien, faire telle ou telle chose ». Ce sens profond est ce qui lui donnera la force d’oser. Parfois une posture adulte sera directement envisageable, en invitant à chercher des feed-backs objectifs auprès de pairs ou de proches. Mais aussi, en développant l’autoréflexivité plutôt que le jugement à partir d’une observation bienveillante et objective des expériences. C’est la capacité d’auto-reconnaissance qui peut réparer l’égo blessé. Il peut aussi être utile de repenser les places et les positionnements que nous avons non seulement pris l’habitude de prendre mais aussi donné à autrui. Les comparaisons sont le lot de tant de souffrances injustifiées ! Enfin, contribuer en tant que coach à sortir d’un système « d’estime de soi » (évaluation permanente), c’est contribuer à une conscience de l’amour de soi et de la valeur inconditionnelle de notre Être, en permettant au coaché de se rencontrer dans les différentes facettes de lui-même, y compris celles qui maintiennent un regard méprisant sur sa valeur, et d’entrer en amitié avec chacune d’elles.Un dialogue avec les différents aspects intérieurs de soi, développe un moi conscient non jugeant et ouvre le cœur à écouter ses élans.   Aux Etats unis où le droit à l’erreur est culturellement beaucoup mieux toléré, ces questions de légitimité sont beaucoup moins actives : l’expérimentation prime. Quelles expériences vous empêchez-vous de faire actuellement pour des questions de légitimité ? Quand laissez-vous votre être profond exprimer librement ce qu’il a à donner ?

Naviguer avec la honte et la culpabilité : réflexion pour les capitaines d’entreprise

Dans l’immensité de l’océan entrepreneurial, je rencontre des capitaines, gênés dans leur navigation par les deux créatures des flots que sont la honte ou culpabilité. Nées des profondeurs de l’âme, elles sont comme un empêchement à « être », à mettre en acte intuitions et désirs et à oser son impact. Les Origines de la Honte et de la Culpabilité La Honte : Le Poids du Jugement La honte surgit souvent des profondeurs du jugement – celui des autres et celui que nous portons sur nous-mêmes. Les dirigeants se sentent souvent observés, évalués, et mesurés à l’aune de leurs succès et de leurs échecs. La peur de ne pas être à la hauteur des attentes, de décevoir ou de paraître inadéquat nourrit cette honte. Elle devient un fardeau silencieux. En parler, c’est la honte ! Elle empêche d’être soi et impacte les prises de décisions. La Culpabilité : La Vague du Devoir La culpabilité, elle, naît du sentiment de responsabilité et du devoir non accompli. Pour un dirigeant, chaque décision porte le poids des conséquences sur les employés, les partenaires, et l’entreprise entière. Lorsque les actions prises ne produisent pas les résultats escomptés, ou pire, causent du tort, la culpabilité s’insinue, rappelant constamment les normes morales et professionnelles non atteintes. Conséquences pour le Navire Lorsque le capitaine vit la honte ou la culpabilité, tout l’équipage en devient otage. Le navire devient lourd et hésitant. Les marins, observant leur leader se débattre avec ces spectres, sont eux-mêmes pris dans une toile de doutes et de silences. L’innovation se fige, la collaboration se tarit. Le navire, au lieu de voguer vers de nouveaux horizons, dérive lentement vers des eaux stagnantes. Le dépassement : un enjeu transcendant. Pour dépasser la honte et la culpabilité, il est essentiel d’intégrer une dimension de nature plus spirituelle que psychologique. Le « péché originel » a hélas été très mal interprété et son message détourné de son sens profond. « Transcender » ces fléaux destructeurs implique de sortir de l’espace où l’on se considère comme le seul responsable, à l’origine de soi et de tout.  Il s’agit de s’ouvrir à trouver en soi un regard d’amour et de compassion se poser sur nous-même. S’ouvrir à la compassion et au pardon à soi Accueillir la compassion et le pardon, c’est reconnaître notre humanité dans toute sa fragilité et sa grandeur. C’est regarder nos erreurs non comme des poids mais comme des pierres précieuses, polies par le temps et l’expérience, pour nous pousser à évoluer. C’est accepter que, malgré les tempêtes, chaque capitaine reste un être humain, faillible et que l’erreur et l’épreuve ont vocation à dévoiler le magnifique de la nature humaine. Se Libérer des Poids Inutiles La honte et la culpabilité nous rappellent que nous sommes des êtres en constante évolution. Et évoluer c’est sortir des « obligations » et des représentations binaires du bien et du mal. C’est un acte courageux, car pour se différencier des devoirs et jugements qui nous ont construit, il nous faut souvent nous séparer de certains environnements devenus inadaptés. Le prix à payer peut passer par une certaine solitude. Au moins un temps. Le temps de trouver en soi, puis auprès d’un environnement, un espace où l’on peut être accueilli, tel que l’on est. Faillible. Cette libération passe par un acte de foi en soi-même et en son équipe. Avoir foi que, malgré les tempêtes, et les vulnérabilités de chacun, le navire trouvera toujours son cap. Avoir foi que le capitaine et les membres de l’équipage seront d’autant plus capables de naviguer dans des eaux tumultueuses, qu’ils ont la sagesse de se libérer du regard des autres, des engagements trop lourds, et des lois sociales trop binaires. Quitter le « personnage » qui veut être un « homme de bien »  pour aimer la nature « ombre et lumière » que nous sommes tous. Une Nouvelle aube L’époque actuelle se prête à la traversée de tempêtes. Il est temps que chacun mène son bateau hors des carcans que l’on s’inflige sous le jugement de soi ou des autres. En intégrant ces dimensions, les dirigeants deviennent des capitaines capables de guider leur navire à travers les eaux les plus tumultueuses avec empathie et souplesse. Bon vent Capitaines ! et que chaque vague devienne une note dans la symphonie infinie de votre voyage…. Article écrit par Flavienne Sapaly Mob : 06.82.56.38.99 Mail : flavienne.sapaly@devtalents.fr Coach Accréditée EIA Praticien senior et ESIA superviseur